Matière de l'éphémère

Comment matérialiser le temps qui passe ? Cette question revient à chercher à comprendre, pour mieux la saisir, l’évolution inéluctable de nos existences. Un chien, un fils, une mère... c'est toujours l'amour qui anime les personnages de sable de Svetlana Filippova, présidant à leurs plus grandes joies comme à leurs pires déchirements.

"Là où meurent les chiens", court métrage de sable animé, a été réalisé par Svetlana Filippova, en résidence à Ciclic en 2008. 
Svetlana Filippova confie : « pour moi, faire un film, c’est tenter de comprendre le passé.» Là où meurent les chiens interroge en effet le temps qui passe et les traces qu’il laisse, heureuses et douloureuses. Dans ce conte de la vie ordinaire, le chien apparaît comme le symbole de l’amour et de la nostalgie du temps de l’enfance. Il résume à lui seul la tranche commune de trois vies fondamentalement liées : la vie d’un enfant devenu homme, d’une mère voyant partir son fils, d’un chien qui, meilleur ami autrefois, se voit peu à peu oublié. Ainsi, au fil des images, le chien rétrécit et sort parfois littéralement du cadre, au profit du nouvel amour grandissant de son maître qui occupe bientôt tout l’espace.
 
Pour matérialiser son récit, Svetlana Filippova a choisi le sable, élément mouvant et modulable à l'équilibre fragile. Chaque scène de partage, de jeu, de tendresse est un tableau éphémère que le temps souffle et balaie pour laisser place au suivant. Alors, son heure venue, guidé par une étoile filante et les corbeaux ambassadeurs de l’Autre monde, le chien rejoint pour toujours ses joyeux souvenirs. Mais au-delà d’une fin tragique, le terme d'une existence ne serait-il pas le début d'une autre vie et d'un bonheur retrouvé ? Ainsi conclut la cinéaste : « Une image apparaît, celle du pays des énormes corbeaux, où se réalisent les vœux. Une fois là-bas, on se retrouve de nouveau avec ceux qu’on aime. Mais pour y aller, il est vrai qu’il faut mourir. La mort n’est pas si terrible. Elle est le prolongement de nos rêves. » (Extrait de la note d’intention)
De nationalité Kazakh, Svetlana Filippova commence par étudier la philologie à l’université d’Etat du Kazakhstan dont elle sort diplômée en 1991. En 1997, elle poursuit des études de cinéma en suivant des cours d’écriture de scénario et de réalisation, puis se spécialise aussitôt dans le cinéma d’animation. Elle écrit et tourne son premier court métrage en 1998, The Night has come, qui remporte un vif succès en festivals. Svetlana Filippova exerce également en tant qu'illustratrice littéraire et ses oeuvres d'art plastique font l'objet de nombreuses expositions dès 1999.
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Filmographie
 
1998 - The Night has come (Noch Pirshla)
2006 -  Sarah's Tale 
2007 - Three love stories
2011 - Là où meurent les chiens
2014 - Brut
2018 - Mitya's Love