— Publié le 09/03/2023

Examen d'état

Un documentaire de Dieudo Hamadi

Agat Films & Cie, Ex Nihilo, Studios Kabako, Karonink / 90 minutes / 2014

À Kisangani, un groupe de lycéens qui n'ont pas les moyens de s'acquitter de la "prime des professeurs" s'organise pour préparer ensemble l'examen d'État (le baccalauréat congolais). Dieudo Hamadi, jeune cinéaste congolais fait de la société dans laquelle il vit son champ d'investigation exclusif. Aujourd'hui il veut ausculter le futur de sa génération en se focalisant sur l'examen d'Etat (l'équivalent du baccalauréat) qui, pour des milliers de jeunes congolais, ouvre (ou ferme) les portes de l'avenir.
Pour se préparer à ces examens, les étudiants de la République Démocratique du Congo doivent surmonter d'innombrables difficultés et ont recours à plusieurs méthodes, des plus sérieuses aux plus fortuites.
L'Athénée royal de Kisangani se révèlera être un véritable microcosme de la République Démocratique du Congo. Les enjeux de ces examens permettront au réalisateur de porter un regard incisif sur la société congolaise actuelle et sur les réalités d'un pays qui souffre de son passé colonial et dictatorial et du manque d'avenir.

Production : Agat Films (France), Studios Kabako (RDC), Karoninka (Sénégal), Vosges Télévision (France), Vidéo de Poche (France). avec le soutien du Fonds Francophone (OIF / CIRTEF), L'Ambassade de France en RDC, La Procirep et l'Angoa 

Prix : 
36ème Festival Cinéma du Réel - Festival international de documentaires, PARIS, France
* Sélection - Compétition internationale
Prix international de la SCAM (Société civile des auteurs multimédia)
Prix des éditeurs (Potemkine) décerné par un jury d'éditeurs DVD indépendants
Festival International de Documentaire d'Agadir, Maroc : Grand Prix FIDADOC

Sélections en festival :
Toronto Int. Film Fest - Docs selection, Canada
Festival de Lasalle en Cévennes
Etats Généraux du Film Documentaire, Lussas
Festival de Cinéma de Douarnenez, France
Festival Cinéma d'Afrique, Lausanne, Suisse
Festival Int. du Film de Colombo, Sri Lanka

Voir aussi

Le point de vue de Gaell Bedier, source "Les fiches du cinéma"

"L’an passé, Dieudo Hamadi présentait son premier long-métrage documentaire au Réel,Atalaku, et repartait avec le Prix Joris Ivens. Il était de retour cette année avec cet Examen d’État : résultat, Prix International de la SCAM et Prix des Éditeurs / Potemkine, qui viennent confirmer la découverte d’un cinéaste plus que prometteur. Adepte du cinéma direct, le jeune réalisateur qui filmait un personnage isolé (un crieur, un Atalaku) et la foule des participants aux élections présidentielles de 2001 en République démocratique du Congo, reproduit d’abord ici une méthode qui a fait ses preuves : il suit un individu – Joël, lycéen désargenté travaillant comme porteur sur les marchés, qui redoute de ne pas être en mesure de poursuivre les études qui lui ouvriraient le seul sésame pour un avenir un tant soit peu désirable (l’examen d’État), s’il ne trouve pas de quoi payer la « prime des professeurs », un scandale en soi ! – pour assez rapidement s’introduire dans un groupe de lycéens finalement renvoyés du lycée comme Joël, et qui vont se réunir dans un « maquis » (une maison dont la construction a été abandonnée et qu’ils vont louer) et organiser seuls leur réussite à l’examen. C’est là que le documentaire commence véritablement et qu’il nous emporte dans une aventure initiatique et politique : avec la constitution de cette microsociété, les difficultés qu’il y a à vivre ensemble, l’établissement d’une structure hiérarchisée (politique), de principes, la répartition des responsabilités calquée sur les us et coutumes en vigueur dans la société dont ils sont issus (les femmes à la cuisine, par exemple). Ils ont deux mois pour se préparer et utiliserons tous les moyens à leur portée : révisions à partir d’un corpus troué (les professeurs n’ayant pas été rémunérés en temps et en heure, ils ont longtemps déserté les salles de classe), consultation de marabouts opportunistes, bénédiction dominicale de stylos bille, prière quotidienne et pour finir, consultation d’anciens devenus maîtres en antisèches qui leur assurent que c’est bien le seul moyen d’obtenir leur diplôme (ce en quoi, apparemment, ils ont raison !). Ils s’exécutent, la plupart en sortent gagnants et reçoivent la nouvelle de leur réussite aux examens comme ils l’ont vécu : avec un mélange de satisfaction personnelle et de joie intense face à quelque chose qui tient tout de même un peu du tour de passe-passe ou de la sorcellerie ; on croirait qu’ils ont, non pas été reçus, mais exaucés ! Dieudo Hamadi retrouve alors son personnage de départ, Joël, à nouveau isolé, déconfit puisqu’il a échoué et qu’il ne sait pas s’il pourra rempiler.
Le réalisateur ne se soucie pas d’analyser dans son documentaire tel dysfonctionnement ou telle injustice : il raconte une histoire qui est un peu la sienne et que seul le réel sait si justement écrire, et c’est la dramaturgie qu’il met en place qui suscite a posteriori une série de questionnements sur l’état d’une société qui fait si peu de cas de l’éducation de ces jeunes :déclassés, ils sont voués à la misère et aux petits boulots non qualifiés ; diplômés, ils ont en main un sauf-conduit pour un avenir plus qu’incertain, sorte de faux papier dont chacun connaît la valeur, obtenu à l’issue d’une formation et d’un examen qui participent de la même mascarade."