Etude COVID 19 : constats et enjeux généraux

En termes de constat, l'étude fait clairement ressortir que les filières image et livre sont des communautés professionnelles fortement impactées par le COVID 19, inquiètes et en sursis.

Déjà fortement présentes depuis quelques années, les plateformes ont fini par acquérir, du fait des confinements répétés et de la fermeture des lieux culturels (librairies, médiathèques, salles de cinéma), une place prépondérante. En l'absence de lieux culturels, les spectateurs et des lecteurs ont trouvé auprès des plateformes un moyen d'assouvir leur besoin d'art, de culture ou de simples divertissements accélérant ainsi les modifications de leurs pratiques culturelles.

Cette double accélération du changement engendre une perte complète de repaires pour les professionnels du livre et l'image. Non seulement sont-ils contraints d'explorer de nouveaux marchés et de s'adapter à de nouvelles pratiques, mais ils n'ont aucune assurance que les marchés plus traditionnels, sur lesquels leur économie actuelle repose, seront préservés.

Alors que ces secteurs d'activités faisaient déjà l'objet de profondes réformes nationales et européennes, notamment pour l'image (réforme de la chronologie des médias, transposition de la directive SMA, réforme du droit d'auteur), les filières image et livre sont maintenant contraintes de s'adapter à marche forcée aux évolutions engendrées par la prédominance des plateformes.

Évidemment, une telle situation provoque une profonde et réelle inquiétude tant dans le secteur du livre, que dans le secteur de l'image. 

2 filières fortement impactées par la crise du COVID 19 :

Acteurs économiques à part entière, contribuant activement au développement économique de notre pays et à son attractivité, les filières images et livre n'échappent pas à la crise provoquée par les confinements successifs et les arrêts brutaux d'activités qu'ils provoquent. 

Concernant la filière image plus spécifiquement :

Les producteurs de la région Centre-Val de Loire évaluaient en juillet 2020 leurs pertes sèches à 460 000€, soit 21% des dépenses qu'ils avaient engagées sur la production de leurs films.

Les auteurs de la région Centre-Val de Loire estiment quant à eux enregistré une perte de rémunération de 45% par rapport aux rémunérations initialement prévues.

Enfin, les techniciens et comédiens de la région Centre-Val de Loire estiment que la perte de leurs rémunération s'estime à concurrence de -60%, par rapport aux rémunérations initialement attendues.

Finalement, ce sont 38 projets qui ont été annulés, toutes branches confondues. Comme au plan national, le documentaire est le format principalement concerné. Le Syndicat des Producteurs Indépendants estimait en octobre 2020, que les documentaires représentaient 50% de l'ensemble des œuvres impactées par le COVID 19 : cinéma et audiovisuel confondu.

Sur un territoire, où 68% des producteurs produisent du documentaire cet élément s'avère particulièrement inquiétant.

Par conséquent, dans ce contexte : 

  • 94% des professionnels de l’image de la région Centre-Val de Loire s’inquiètent encore davantage de l’impact de la réforme audiovisuelle, 
  • 75% des professionnels de l’image de la région Centre-Val de Loire s’inquiètent encore davantage de l’impact de la réforme de la chronologie des médias, 
  • 66% des professionnels de l’image de la région Centre-Val de Loire s’inquiètent encore davantage de l’impact du renforcement des services SVAD et des plateformes

Concernant la filière livre plus spécifiquement :

62% des éditeurs et 88% des libraires évaluent à plus de 20% les pertes de chiffre d'affaires, en juillet 2020.

Finalement ce sont 76 titres qui ont été reportés à fin 2020, et 88 à 2021. Ceci laisse présager un important effet accordéon, et un important encombrement en librairie, et par conséquent, des ventes limitées, surtout pour les éditeurs.

Enfin concernant les auteurs, 70% d'entre eux estiment leur perte sèche moyenne à 1 000€. Ces pertes sont principalement liées à l'annulation des rencontres et salons du livre.

Par conséquent, dans ce contexte : 

  • 62% des éditeurs et 69% des libraires se disent inquiets par la situation engendrée par la crise sanitaire
  • 47% des éditeurs, 49% des libraires et 27% des auteurs craignent pour la pérennité de leur activité 

Des filières solides mais en sursis 

Malgré ces inquiétudes fondées, les filières régionales du livre et l'image affichaient en août 2020 une certaine solidité, mais qui était en sursis. Si la plupart des acteurs de ces deux communautés avaient réussi à limiter leurs frais fixes au maximum, pour anticiper les éventuelles difficultés à venir, aucun d'entre eux ne disposaient des moyens suffisants pour relancer leur activité.

Des aides exceptionnelles peu sollicitées :

Il ressort de cette étude que les professionnels de l'image et du livre ont finalement très peu sollicité les aides exceptionnelles mises en place par l'État et les collectivités territoriales.

À l'exception des Prêts Garantis par l'État pour les libraires et les éditeurs, et les chômages partiels pour l'ensemble des entreprises culturelles de ce secteur, les autres dispositifs ont peu ou pas du tout été mobilisés.

Cette faible sollicitation ne permet pas pour autant d'en déduire la solidité générale de ces deux filières. En effet, dans la grande majorité des cas, ces fonds n'ont pas été mobilisés, car ils étaient jugés trop compliqués à obtenir pour des TPE ou PME souvent unipersonnelles, ou parfois même jugés inadaptées aux secteurs d'activités concernés. 

À noter, pour des raisons de date de clôture des questionnaires, les résultats de l'enquête n'ont pu intégrer les demandes faites dans le cadre du plan de soutien régional à la culture et concernant la filière du livre, les demandes faites auprès du CNL, notamment pour les points de vente du livre.

  • Aides exceptionnelles principalement sollicitées par la filière image :

 

 

 

  • Aides exceptionnelles principalement sollicitées par la filière livre :

Des trésoreries encore positives, mais insuffisantes :

En juillet 2020, les sociétés régionales du livre et de l'image affichaient un bilan financier plutôt solide, car 100% des sociétés de production régionales, 100% des libraires et 96% des éditeurs indiquaient avoir une trésorerie et des capitaux propres positifs. 

Malheureusement cette trésorerie s'avérait déjà à l'époque complètement insuffisante pour relancer l'activité économique de ces deux secteurs.

À titre d'exemple, les sociétés de production affichaient une trésorerie à peine suffisante pour couvrir 10 mois de frais généraux, ne leur permettant absolument pas d'investir dans la production de leurs films sans mettre leur société en péril.

Par ailleurs, l'apparente solidité des éditeurs et libraires régionaux mérite d'être considérablement nuancée, car la plupart d'entre eux ayant eu recours massivement au Prêt Garanti par l'État, ils se retrouvaient déjà en juillet 2020 dans l'obligation de rembourser ces prêts dès 2021. Sans reprise réelle d'activité, ce remboursement risque de s'avérer difficile voire impossible. Force est de constater que le second confinement n'a pas apporté la réassurance tant espérée.

De même, si 77% des techniciens et comédiens régionaux ont pu bénéficier de l’année blanche, ce sursis s'avérera peu satisfaisant si les activités de tournage ne reprennent pas dans des proportions identiques à celles que nous avons pu connaitre en 2019.

Enfin, plus inquiétant, 31% des auteurs seulement estimaient en juillet 2020 avoir une situation financière leur permettant de survivre plus de 6 mois.