Un amour de télés : premières marionnettes en résidence

Un amour de télés, court métrage d'animation en volume, est l'un des premiers films à être soutenu et accueilli en résidence à Château-Renault. Ce film de Denis Walgenwitz raconte les aventures amoureuses entre Funken, un téléviseur à l'ancienne, et Sonia, une télé à la pointe et cablée. Il aborde ainsi, sur un air joyeusement suranné et décalé, les questions de la modernité, de la place de la télévision aujourd'hui, mais aussi et surtout, une histoire d'amour intemporelle. 

Alors que la vie de Funken se résume à diffuser les mêmes programmes depuis des années pour sa vieille propriétaire, l'arrivée de Sonia va bouleverser ses habitudes. Hors des codes de la vie des hommes, les deux postes de télévision vivent une histoire d'amour digne des feuilletons télés. Toutefois, sous ses airs de romance, le court métrage ne se prive pas de questionner l'objet tant convoité de notre société moderne et sa place dans notre quotidien.

Alors que la question de la modernité est au coeur du film, le réalisateur fait le choix de ne pas utiliser de techniques numériques. Des décors aux marionnettes jusqu'à l'animation des acteurs, le court métrage a été entièrement réalisé à partir de techniques traditionnelles, sans aucun effet spéciaux. La technique du "Lipsync" a été utilisé pour synchroniser les bouches et les paroles des personnages. Sonia et Funken sont incarnés par deux visages connus, très télévisuels d'ailleurs : les comédiens Aurélia Petit et Christophe Salengro, président de l'émission Groland disparu le 30 mars 2018 à l'âge de 64 ans.

Ce film a initié la politique de soutien de Ciclic et de la Région en faveur du court métrage d'animation, en créant un lieu susceptible d'accueillir des films qui utilisaient des techniques de fabrication traditionnelles. La résidence s'est positionnée dans la découverte d'auteurs, tels que Jean-Luc Gréco et Catherine Buffat, mais aussi Pierre-Luc Granjon, Sophie Roze ou Sébastien Laudenbach, à l'instar de ce que la structure et la politique régionale accompagnent en fiction et documentaire dans le cinéma d'auteur contemporain.

 

C'est qui Denis Walgenwitz ? 

Né en 1968 à Colmar, Denis Walgenwitz obtient en 1991 le Diplôme National Supérieur d'Expression Plastique en Cinéma à l'Institut d'Arts Visuels d'Orléans. Outre son métier de réalisateur, il a mis en place et dirigé le studio de tournages de films d'animation de Ciclic à Château-Renault, de 2000 à 2005, et a été président de l'Association Française du Cinéma d'Animation (AFCA).

Il réalise des courts métrages d'animation (Les Trois Petits Cochons dans l'espace et Comme un pixel sur la soupe avec Nathalie Pat, Un amour de télés... ) et occupe depuis 2005 la fonction d'assistant-réalisateur sur des longs métrages, notamment Persepolis de Vincent Paronnaud et Marjane Satrapi. Il participe au développement et la production de longs métrages tels que Moi, moche et méchant de Chris Renaud et Pierre Coffin, Le Congrès d'Ari Folman, La Tortue rouge, de Mickael Dudok De Wit, Ma vie de courgette de Claude Barras... 

Récemment, il réalise avec Vincent Paronaud le court métrage en stop motion La Mort Père & Fils, adapté de la bande dessinée de Vincent Paronaud Welcome to the death club. Une rencontre inattendue entre le monde minutieux de la marionnette animé et le ton grinçant de Winshluss.

Il est très actif sur son blog Futur 2002.

Denis Walgenwitz nous présente son parcours et les débuts de la résidence dans un entretien réalisé le 22 mai 2015.

Making of "Un amour de télés" / Court circuit, ARTE

Funken Salengro, ou comment Christophe Salengro devint Funken

"Au départ, Funken devait être joué par un acteur de soap-opera, idéalement coiffé d'un brushing et un air vaguement niais dans le regard.

Finalement, Charles Petit, le producteur du film fit en sorte que ce fût Christophe Salengro. Ça ne faisait pas mon affaire: il était loin du Latin Lover de mes rêves, et avec son visage si caractéristique, il allait immanquablement attirer tous les fans de Groland qui seraient déçus par ce film en demi teinte.

Très vite, l'idée de l'utiliser à contre-emploi germa dans mon esprit, et les dialogues écrits par Jean-Luc Fromental pour le film seraient l'antidote idéal dont j'avais besoin pour cela.

Le jour du tournage arriva, et j'assistais, impuissant, à la naissance d'une troisième voie: Christophe allait interpréter ce rôle avec un mélange de naïveté et de « pince sans rire » assemblés en un cocktail délicat. Finalement, il allait respecter une bonne part de la psychologie originelle du personnage, en lui apportant une touche d'intelligence et surtout, une sensibilité inattendue.

Je sortais de la séance ravi, et je gardais le lendemain de bonnes crampes à l'abdomen tant j'avais ri.

Dans « Un amour de télés », il joue donc Funken, et en 13 minutes, on peut le voir évoluer et passer sans que l'on s'en rende vraiment compte d'un personnage maladroit et mal dans sa peau, à un homme sûr qui parvient à ses fins. Car au final, parmi les nombreux talents qu'il avait, celui d'acteur n'était pas des moindres, et il me semble qu'il s'étendait bien au delà du champ des rôles qu'on avait bien voulu lui confier au cour de sa carrière."

Denis Walgenwitz