Créer pour se souvenir

Quand les mots ne sont plus là, il reste les images et les gestes pour raviver les souvenirs. L’histoire reprend alors peu à peu sa forme et, avec elle, le présent retrouve son sens. Par un jeu de piste composé d’images de différentes natures, Une Ombre au tableau trace le cheminement d’un fils vers sa mère en manque de mémoire.

« J’ai toujours eu du mal à parler avec ma mère ». Ainsi commence le documentaire d’Amaury Brumauld, témoignage d’un éloignement certain et profond. De ce constat sans appel va pourtant naître l’esquisse d’un langage commun, propre à la mère et au fils, qui va redonner souffle à leur relation et lui conférer une complicité inédite.
Ce langage c’est celui de l’image, ou plutôt des images et leurs diverses formes, avec toute la puissance qu’elles peuvent transmettre. Qu’elles soient réelles ou imaginaires, fixes, en mouvement ou en naissance sur la toile de la mère-peintre ou sur l’écran du fils-réalisateur, ce qui compte, c’est leur force d’évocation. Aussi, à l’instar du puzzle représentant la demeure d’enfance de la mère que les deux protagonistes s’attachent à reconstituer, la mémoire se répare par petits morceaux rattachés ici ou là.  
Au fil des routes de campagne, des regards et sourires échangés et des coups de pinceau, c’est la vie elle-même qui réapparaît, comme lors de la projection en 16mm d’un vieux film de famille retrouvé.
 
« Jamais, au cinéma, le rapport mère-fils n’avait été montré avec autant de pudeur. Aucun pathos excessif. Aucune effusion de sentiments. Le film n’est pas un mélodrame, malgré la présence de la maladie. Il ne cherche aucun apitoiement. On peut même dire qu’il n’est pas un hommage à la maternité. (…) Il n’y est pas question de l’enfance ou de l’adolescence. Il n’y a dans le film aucun secret de famille à rechercher. Ce n’est pas son propos. Il est entièrement inscrit dans le présent, ce vécu particulier d’une mère qui perd la mémoire et d’un fils qui est là, à côté d’elle, pour ne pas la laisser sombrer définitivement dans la nuit de l’oubli. »  
Jean-Pierre Carrier, pour le Festival national du film d’éducation / CEMEA
 
Une Ombre au tableau a été sélectionné au festival Cinéma du Réel et aux Etats Généraux du documentaire de Lussas en 2009.

« Je n’avais jamais imaginé filmer ma mère. Avant sa maladie elle parlait beaucoup. Dans ce flot de paroles, je ne la comprenais pas. Puis un jour, elle a commencé à avoir des difficultés à s’exprimer. (…)  Cette perte des mots a rendu notre relation plus forte et j’avais l’impression de mieux la comprendre. C’est ce changement de regard sur ma mère qui m’a sans doute conduit à faire le film. » Amaury Brumauld 

Filmographie : 
2013 - La Passagère (fiction)
2008 - Une Ombre au tableau (documentaire)
2005 - Zebra (documentaire)
2004 - Voyage immobile (documentaire)