Analyses et tendances

Après un an et demi d’arrêt, trois confinements successifs, les fermetures des salles de cinéma, la migration en ligne de marchés et de festivals, nous avons toutes et tous constaté que la pandémie avait indéniablement altéré notre perception du monde. Difficile, dans ces conditions, de reprendre le cours habituel de nos vies, comme si de rien n’était. Pour paraphraser Luc Vaillant, dans Libération, la sortie de la pandémie a eu un véritablement goût de « retour à l’anormal ! ».

Malgré tous nos espoirs et tous nos efforts pour vivre « comme avant », nos vies et nos capacités de projection restaient indéniablement contraintes par la pandémie. D’abord, parce que le COVID 19 encore très menaçant, régissait une bonne partie de notre vie quotidienne ; enfin parce que les confinements et isolements successifs ont violement bouleversé nos modes de vies et de pensées, tant collectifs, qu’individuels.Le seteur du cinéma et de l’audiovisuel n’a évidemment pas échappé à ces remises en question. Les impacts de la pandémie ont d’ailleurs été nombreux. Confinées les productions ont tantôt été ralenties, tantôt annulées ; mettant en exergue la précarité des professionnels œuvrant à la création et à la production d’œuvres indépendantes. Avec les frontières fermées, on doutait que les logiques de coproductions internationales puissent un jour de nouveau exister. Enfin, les salles de cinéma fermées, les plateformes ont eu le champ libre pour accélérer leur irrésistible croissance, contraignant ainsi le cinéma français à revoir sa chronologie des médias, et insuffler le doute quant à l’immuabilité de son système de financement.

Au sortir de la pandémie, le paysage du cinéma français ne ressemblait plus beaucoup à celui que nous connaissions initialement. La perte de repères pour les professionnels était d’autant plus étourdissante, que les transformations se sont opérées brusquement. Dans ce contexte des réponses étaient, et sont encore, attendues à l’égard des politiques publiques. Quelles ont-elles été ? Qu’elles seront-elles ? Dans cette période en pleine mutation, comment sont et seront conçues les politiques publiques territoriales en faveur du cinéma et de l’audiovisuel ?

Nous aimerions justement profiter des collectes menées dans le cadre du panorama des aides territoriales à partir de 2021 pour étudier, sur les 3 prochaines années, les réponses et les ajustements opérés par les collectivités territoriales, en faveur de la création cinématographique et audiovisuelle. Sur la base des observations que nous avions pu faire les années précédant la pandémie, et des enjeux soulevés par ce nouveau contexte, il nous a semblé pertinent de concentrer notre analyse sur trois thèmes spécifiques suivants :

1 - Le soutien à la coproduction internationale

Depuis les nouvelles conventions de collaborations territoriales signées en 2017 entre les régions et le CNC, nous observions l’apparition de politiques territoriales en faveur de la coproduction internationale.En raison de la crise sanitaire, les risques des investissements en faveur de projets internationaux ont considérablement augmenté, entrainant de facto une diminution de ces derniers. De fait, contraints par la pandémie et les confinements successifs, les coproducteurs devaient tenter de répondre à des injonctions contradictoires : ils avaient d’abord l’obligation de livrer leurs productions, mais étaient légalement et sanitairement empêchés de répondre à leurs obligations de dépenses territoriales.A terme, quel a donc été l’impact de la pandémie et des confinements sur ces politiques publiques en faveur du développement international ? Les institutions vont-elles revoir leurs investissements à la baisse ? Où vont-elles chercher, au contraire, à favoriser davantage ces collaborations internationales ?

2 - Le soutien aux auteurs et autrices

De toutes évidences, la pandémie du COVID 19 a été un accélérateur d’inégalité. Déjà présentes avant 2020, la précarité des auteurs et des autrices du cinéma et de l’audiovisuel a donc été particulièrement accentuée.Face à cette situation, les organismes professionnels se sont donc mobilisés pour alerter les pouvoirs publics, qui ont pu réagir avec la mise en place de fonds d’urgence spécifiquement dédiés à cette branche professionnelle. Aussi, de nombreuses réflexions ont été ouvertes par les associations d’auteurs, et sociétés de gestion de droits, pour veiller à une meilleure prise en considération du travail d’écriture et ses modalités. Parallèlement, les auteurs et autrices n’ont jamais été aussi convoités par les plateformes, en pleine explosion. A tel point, qu’une course effrénée s’engage entre production indépendante et plateformes pour attirer ou conserver ses talents. Quelles seront, sur le long terme, les réponses apportées par les collectivités territoriales à cette problématique ?

3 - La prise en compte de l’enjeu écologique

Impossible d’ignorer aujourd’hui les enjeux climatiques et la crise énergétique, qui s’imposent à nous. Présents à chaque instant de notre vie quotidienne, ils interrogent nécessairement aussi les pratiques dans le secteur du cinéma et de l’audiovisuel. Depuis, plusieurs années déjà, les professionnels du cinéma, en France et en Europe, tentent de se mobiliser pour proposer des ressources et de l’information, en vue de développer des réponses concrètes, globales. 

Comment les collectivités territoriales s’emparent de ces questions ? Quels impacts cela aura-t-il sur les politiques de soutiens ?

Inscrit dans le cadre de la convention de coopération Etat-Région-CNC, le panorama des interventions territoriales est réalisé avec le soutien de la Région Centre-Val de Loire, en partenariat avec le CNC.

Article écrit par : Pierre Dallois / Directeur de la publication : Philippe Germain / Date de publication : 10 janvier 2023